Je n’ai pas
souvenance d’avoir vu de ces barques durant mes quinze premières années de
présence à Ternate. Il s’agit de grosses ‘’Bangka’’, des ‘’Bangka’’ d’une
douzaine de mètres, Bangka que j’ai aussitôt nommées araignées du fait des
nombreux et longs plots de bambou qui les équipaient. De loin, ces perches
ressemblent à des pattes d’arachnides géants, impressionnant.
Il y a deux
ans de cela, j’en suis certain, il n’y en avait pas ! En 2015, elles
étaient trois ou quatre, dont celle qui allait devenir la mienne. Mais en ce
début d’année 2016, j’en ai compté vingt et une sur la rivière Maragondon et il
doit y en avoir quatre ou cinq sur le petit bras de rivière que l’on nomme ici
River Side.
En fait de
petit bras, il s’agit officiellement de la Gapan River, en fait plus un
ruisseau qu’une rivière, mais qui devient torrent furieux à la moindre averse.
Je me
souviens encore de l’arrivée précipitée à la maison d’une de nos anciennes
‘’Maid’’ ; je ne me souviens plus si c’était après le passage de Millenyo
ou de celui de Ondoy. Cette personne, dont le mari est pêcheur, habitait à
l’époque à proximité de ce torrent. La montée brutale des eaux, en quelques
minutes ce sont plusieurs mètres qui ont submergé les berges, a tout juste
laissé le temps aux riverains de se réfugier en hauteur.
Pas le temps de
prendre quoi que ce soit, les femmes et les enfants d’abord ; tout a été
emporté, maisons, effets personnels, ustensiles, barques, matériels de pêche,
etc.
Une fois les
eaux retirées, les berges étaient comme pelées, rasées, rabotées ; arbres,
arbustes et même l’herbe, tout avait disparu, ne laissant qu’un sol nu, quasi
lunaire et parsemé de quelques détritus.
Donc notre
ancienne Maid, mère d’une famille nombreuse ayant absolument tout perdu, est
venue nous demander si nous aurions quelques vêtements pour les enfants. Pas
vraiment un problème, avec les six que nous avons, certain que nous devrions
pouvoir trouver quelque chose à mettre sur le dos de ces gamins. Shorts, tee-shirts,
anoraks, vêtements un peu plus chauds, imperméables, car il continuait à
pleuvoir, chaussures, quelques ustensiles de cuisine, ensemble auquel mon
épouse a ajouté du riz, quelques conserves, du lait, du café, du sucre et
autres bricoles.
Malheureusement,
ce n’est pas uniquement la famille de notre ‘’Maid’’ qui a été sinistrée, ce
sont des dizaines, plus certainement des centaines de personnes qui, en
quelques minutes, ont tout perdu. Je crois même me souvenir que Ternate a eu à déplorer plusieurs morts lors du
passage, de nuit, de ce typhon.
Mais revenons
à nos moutons et donc à nos ‘’Bangka’’ araignées.
Elles sont du style ‘’Visaya’’, c’est ce que m’a appris mon Kompadre Digus, viennent de l’île de Masbate, une île située dans le sud et distante de quelque cinq cents kilomètres. Elles naviguent généralement à plusieurs et effectuent le trajet Masbate / Ternate en trois jours.
Elles sont du style ‘’Visaya’’, c’est ce que m’a appris mon Kompadre Digus, viennent de l’île de Masbate, une île située dans le sud et distante de quelque cinq cents kilomètres. Elles naviguent généralement à plusieurs et effectuent le trajet Masbate / Ternate en trois jours.
Montées le plus souvent par trois
hommes, souvent accompagnés de femmes et d’enfants, elles s’arrêtent la nuit. Pour
laisser l’équipage se reposer, mais également du fait d’une totale
méconnaissance des règles et pratiques les plus élémentaires de navigation. Pas
de boussole sur ces barques, pas de cartes marines, encore moins de GPS, on
navigue à vue, de jour bien évidemment et en suivant la côte.
Parties de la
région de Milagros sur la côte Ouest de Masbate, elles ont fait cap au Sud-ouest
dans le golf d’Asid, passé le cap Balud, puis sont remontées au nord avant que
d’attaquer la traversée jusqu’à l’île de Burias. Cap au Nord-ouest, elles sont
alors passées entre Luzon et Marinduque puis, suivant un cap Ouest, elles ont
rejoint le Verde Passage, celui qui sépare Luzon de l’île de Mindoro.
Un peu avant
Calatagan elles ont repris un cap nord, elles ont passé Nasugbu, puis Iba, la
limite Sud-ouest de la baie de Manille et sont alors entrées dans la baie,
avant que de venir s’ancrer dans la rivière Maragondon.
Avantage du
pays aux 7.107 îles, par beau temps l’on est toujours en vue d’au moins une
île ; les pics, montagnes et volcans sont visibles à plusieurs dizaines de
kilomètres. En cas d’orages, lorsque la visibilité sous l’averse tombe à
quelques mètres, c’est une autre histoire et avoir au minimum une petite boussole
à bord peut s’avérer être une sage précaution.
L’arrivée de
ces barques, par petits groupes de trois ou quatre unités, s’est étalée de la
fin du mois de mars à la mi-avril. Une fois arrivées, il a fallu les équiper ces Bangka, car il faut savoir que les arachnides arrivent sans leurs
pattes ! Achat de six grands plots de bambou de dix mètres et plus, ainsi
que deux pièces plus petites qui vont servir à soutenir les rampes lumineuses.
Donc nous avons bien huit pattes, comme toute araignée qui se respecte.
Installation des douilles et des lampes de cent watts, mise en place et essais
du générateur électrique, un peu de bricolage, de raccordement et tout est fin
prêt pour aller à la pêche des « pusit », le nom local du calamar. Et oui, ces
barques venues de Masbate, viennent pêcher le calamar dans la baie de Manille,
plus de pusit dans leur province et, comme me l’ont dit plusieurs
pêcheurs : « C’est un fait, nous suivons les bancs jusqu’ici ».
C’est une
pêche au filet où les lamparos, car il s’agit d’une pêche de nuit, sont
remplacés par deux rampes soutenant chacune entre vingt-cinq et quarante
ampoules de cent watts. Vous pouvez me croire, quand la chose, ou plutôt quand le
générateur se met en route, huit mille watts en pleine mer, çà en jette, çà
éclaire la sombre nuit tropicale. Quand il y a une vingtaine de ces Bangka dans
une zone, c’est une véritable ville de lumière qui s’installe pour quelques
heures au milieu de la baie.
Contrairement
aux pêcheurs locaux, qui pêchent en les piégeant les calamars d’un kilogramme et
plus, ce type de pêche de nuit est destiné à la capture de spécimens plus
petits, ceux de cent à deux cents grammes tout au plus.
Un peu avant
que ne tombe la nuit, une fois
ravitaillées en carburant, lorsque boissons, nourritures et cigarettes
sont montées à bord, les barques vont lever l’ancre. Mettre en route leurs petits
moteurs diesel avec des nuages de fumée noires, puis vont glisser,
nonchalantes, en direction de l’estuaire.
Au point du
jour, alors que le soleil n’a pas encore daigné nous gratifier de ses premiers
rayons, elles rentrent et viennent s’accrocher l’une à l’autre, à la queue leu
leu, seule la première ayant accès à la terre ferme. Les équipages, chargés de
la pêche de la nuit, vont alors passer d’une barque à l’autre afin de rejoindre
terre et d’apporter le produit de leur
travail à la vente.
Il faut
savoir que ce genre de pêche ne peut être rentable qu’à la condition que chaque
Bangka rapporte un minimum de cinq mille pesos chaque nuit, ou plutôt chaque matin.
Car les barques sont soit louées, de l’ordre de mille à mille cinq cents pesos par jour, soit achetées à crédit et ce crédit il faut le rembourser.
Car les barques sont soit louées, de l’ordre de mille à mille cinq cents pesos par jour, soit achetées à crédit et ce crédit il faut le rembourser.
En général la
répartition des gains est la suivante : deux parts pour le patron pêcheur,
une part pour chacun des aides, une part à une part et demie pour la barque et
le reste pour le carburant, la maintenance, la nourriture et les boissons.
Dès la
mi-mai, je me suis rendu compte que certaines barques ne sortaient plus
régulièrement, elles restaient là, à l’ancre, les équipages, restés à bord,
nonchalamment endormis dans des positions souvent étranges.
À la question pourquoi ?, il m’a été répondu : « pas assez de prises pour compenser les frais engagés ». À la vente en gros, les calamars valent entre cent et cent cinquante pesos du kilo, cela va dépendre de la quantité pêchée. Plus il y a de calamars, moins les prix sont élevés.
Début juin,
environ la moitié de la flottille, des Bangka désarmées de leurs pattes, s’en
est retournée à Masbate, celles des équipages arrivés sans femmes et enfants.
Ne sont restés à Ternate que ceux arrivés en familles et ils ont commencé à
construire quelques cabanes pour abriter les femmes et les enfants.
À la mi-juin,
je dirais que sur la dizaine de Bangka qui se trouvait sur la rivière, la
moitié avait été désarmée, les pattes et les rampes lumineuses avaient disparu.
D’un autre côté, durant une longue semaine, du matin aux premières lueurs du
jour jusqu’à tard le soir, sous un éclairage blafard femmes et enfants étaient
occupés à la confection de longs filets de pêche.
En fait la moitié
des ‘’barques araignées’’ se retrouvaient simples barques munies de filets et
ce, du fait de la pénurie de calamars. Surpêche, courants contraires, mauvaise
saison ? Toujours est-il que le peu de prises avait obligé la moitié de la
flottille à s’en retourner à Masbate et que la moitié restante avait été contrainte
à changer de mode de pêche.
Il y a deux
trois jours de cela, alors qu’il faisait presque nuit, je me trouvais sur ma
barque et j’ai été surpris de voir de très nombreuses petites Bangka sortir en
mer, quelque chose de tout à fait inhabituel à cette heure tardive. Ce n’est
que le lendemain matin que, grâce à mon Kompadre Digus, j’ai eu l’explication
de ce qui se passait. Les Pusit étaient enfin arrivées, par dizaines de
millions elles se trouvaient en bancs serrés à proximité de l’estuaire et
certainement bien au-delà.
Digus m’expliquant
que lui-même et un aide avaient pêché plus de vingt kilos de céphalopodes la
nuit précédente ! Plus de deux mille pesos pour une sortie de quelques
heures et ce avec des lignes à main, sans filets. Combien de centaines de kilos
a la possibilité de pêcher une Bangka araignée en une nuit complète ? Deux
cents, trois cents kilos, plus ?
Les Bangka de
Masbate, celles reparties début juin, alors qu’elles devaient rester jusqu’au
mois d’octobre, ont donc raté la manne divine !
Et bien oui,
cette année 2016 a vu l’éclosion des œufs de calamars retardée, ce qui demeure
pour moi un mystère. Retard de l’arrivée des géniteurs, température de l’eau
inadéquate, courants contraires ? Je ne sais. Toujours est-il qu’ils sont
nombreux ceux qui, venus de loin, ont totalement raté leur saison de pêche !
Certains risquent certainement d’en ressentir les effets pendant de longs mois,
voire plusieurs années.
Une barque de
douze mètres de style Visaya coûte entre 250 et 450.000 pesos, neuve.
L’écart de prix s’explique par la qualité du bois employé, du type de moteur installé, du générateur de courant utilisé (généralement ce dernier est entraîné par un moteur à essence Briggs & Straton de 16 chevaux) et de la finition de la Bangka.
L’écart de prix s’explique par la qualité du bois employé, du type de moteur installé, du générateur de courant utilisé (généralement ce dernier est entraîné par un moteur à essence Briggs & Straton de 16 chevaux) et de la finition de la Bangka.
Le plus
souvent ces barques sont équipées d’un moteur diesel de 10 à 15 chevaux qui
consomme entre un litre cinq et deux litres à l’heure. Le Briggs & Straton du
générateur consommant environ deux litres, mais d’essence, à l’heure et il va
tourner environ huit heures chaque nuit.
Estimation du
coût d’une nuit de pêche avec une Bangka araignée :
Carburant diesel, de 120 à 150 pesos (le diesel est à 20 pesos du litre),
Carburant essence, 500 à 750 pesos (l’essence est à 40 pesos du litre),
Un peu d’huile et de maintenance, que j’estime à 150 pesos par sortie en mer.
Donc une nuit en mer revient entre 770 et 1.050 pesos.
Somme à laquelle nous devons ajouter la location ou le remboursement de la barque, si cette dernière a été achetée à crédit ; de 1.000 à 1.500 pesos, parfois plus.
Carburant diesel, de 120 à 150 pesos (le diesel est à 20 pesos du litre),
Carburant essence, 500 à 750 pesos (l’essence est à 40 pesos du litre),
Un peu d’huile et de maintenance, que j’estime à 150 pesos par sortie en mer.
Donc une nuit en mer revient entre 770 et 1.050 pesos.
Somme à laquelle nous devons ajouter la location ou le remboursement de la barque, si cette dernière a été achetée à crédit ; de 1.000 à 1.500 pesos, parfois plus.
À un prix d’achat
de 100 pesos par kilo, les premiers vingt, voire vingt-cinq kilos, sont uniquement
destinés à couvrir les frais de la barque.
Pas facile
cette vie de marin-pêcheur de pusit aux Philippines !
Et encore, je ne vous ai pas parlé de la fatigue physique que représentent la descente et la remontée des filets durant toute une nuit. Mais j’aurai certainement l’occasion d’y revenir, j’ai l’intention de les accompagner une nuit prochaine.
Excellente journée à tous et à toutes.
Il est ici 14 h 00 et l'orage quotidien, qui devrait durer une heure... menace.
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7107 îles, plus de 36.000 kilomètres de côtes,
des milliers de plages de sable blanc, le soleil toute l’année ;
des montagnes qui culminent à plus de 3.000 mètres,
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