Monday, October 7, 2013

CHRONIQUES PHILIPPINES, MANILA !

Cette nuit j’ai rêvé que j’étais en train de grimper une longue colline à bicyclette. Etonnement cette montée, pourtant pentue, s’effectuait sans efforts ou presque, sans que mon corps ressente une quelconque fatigue. Sans peine, sans forcer,  je pédalais et avançais à bonne allure.


Une fois arrivé au sommet, je me suis laissé glisser dans la descente, pédales libres, sans chercher à ralentir ma vitesse. Le torse relevé je savourais le vent relatif qui me rafraichissait tout le corps.

A cet endroit le chemin  présente une surface lisse et parfaite pour rouler, ma vitesse s’accélère considérablement Tout à coup, d’une façon ou d’une autre, j’ai du faire une fausse manœuvre, une erreur de ma part, je roule désormais dans le bas côté, que dis-je, dans l’espèce de fossé tout empierré qui sert, durant la saison, à évacuer les fortes pluies de la mousson.

Et là, je saute, je tressaute, je fais des bonds, je suis secoué, je m’envoie en l’air pour mieux retomber, j’ai du mal à conserver mon équilibre. Et cela dur, cela dur, plusieurs fois je vois venir la chute, je me récupère in extrémis, une fois, deux fois, trois fois … 

La chute semble maintenant évitée, un dernier effort de tous les muscles du corps et je ramène l’engin sur la portion plate de la piste. Ouf, pas passé loin et c’est en sueur que je me réveille.

C’est en me remémorant ce rêve pour le moins étrange, que j’entendis un rat qui sous le lit essayait d’emporter une de mes bottes en la traînant sur le plancher de bois ciré. 

Sans plus m’en occuper, les bottes sont lourdes, fatigué de mes exploits sportifs, je ne tardais pas à me rendormir.


Au petit matin en arrivant au bureau, plusieurs de mes amis et quelques employés m’ont demandé si j’avais ressenti le fort tremblement de terre qui avait frappé la ville et ses environs dans la nuit. J’ai répondu « non ! » Mais sans faire allusion à mon rêve un peu étrange. On a tout de même sa pudeur.

Il y a un sévère tremblement de terre et moi qui n’ai rien ressenti, qui ne me suis même pas réveillé, je faisais de la bicyclette, en rêve.

Il semblerait que les secousses aient duré quarante cinq secondes et mon adjoint me raconte qu’il avait l’impression que son lit faisait le tour de la chambre en se cognant aux quatre murs. Personne, à ma connaissance, n’a été sérieusement blessé, dans la ville tout du moins.

Le lendemain, l’excellent observatoire de Manille dirigé par les Jésuites, nous donnait de complètes informations sur le phénomène.

De retour à ma demeure pour le déjeuner j’appris deux nouvelles qui valent le coup d’être rapportées. La tentative de vol dont a été victime mon cheval préféré et la perte d’une de mes meilleures bottes de cuir, en partie dévorée par un rat.

Un voleur philippin, assez osé tout de même, après avoir retiré tous ses vêtements et s’être enduit le corps d’huile de coco, a réussi à se faufiler sans être remarqué dans l’étable où se trouvait mon cheval.


Après l’avoir détaché et être pratiquement arrivé à la porte cochère donnant sur la rue, le voleur a été troublé par le hennissement de la bête, certainement pas habituée à son odeur d’huile de noix de coco.

Réveillé en sursaut, mon palefrenier qui s’était assoupi dans un endroit ombragé de la cour, à vivement retrouvé ses esprits et s’est mis à invectiver le voleur, « ladron, ladron.. ».

Cette prompte réaction de sa part a totalement sauvé la journée en effrayant suffisamment le voleur. Ce dernier s’est enfui, nu comme un vers, en abandonnant ses vêtements au pied du mur extérieur.

En ce qui concerne mes chaussures, l’une d’entre elle tout du moins, je n’ai pas été aussi chanceux.

Je l’avais bien entendu ce rat, j’avais même fait le rapprochement avec le fait qu’il semblait traîner quelque chose sur le plancher. Mais dans mon demi sommeil je m’étais dit qu’il n’aurait certainement pas la force de traîner mes lourdes bottes jusqu’à son nid.

De plus, en pleine nuit quitter l’abri de la moustiquaire et risquer d’affronter les vampires que sont les moustiques locaux, très peu pour moi. Oh, il ne l’a pas traînée bien loin cette botte, trois petits mètres, pas plus, mais après il en a dévoré la partie de cuir située sur le dessus, celle qui est la plus tendre, tout du moins je le suppose.



En dehors de ces petits problèmes domestiques les choses se déroulent gentiment, sans heurts. Chaque soir, après le dîner, nous nous couchons dans des chaises longues sur la vaste terrasse et contemplons le spectacle de la Croix du Sud  qui se lève derrière les collines. 

Parfois ce sont des points lumineux qui apparaissent aux flancs des montagnes, des feux de brousse, quelques paysans qui tout là-bas font brûler la paille du riz, des branchages ou des bambous.

La musique du piano semble donner beaucoup de plaisir aux employés, au personnel domestique maintenant au nombre de neuf. J’ai fait en sorte que leurs coqs de combat et que les chiots passent la nuit aussi éloignés que possible de l’endroit où se trouve ma chambre.

Il faut dire que ces coqs ont un cri particulièrement perçant. De plus, si jamais l’un d’entre eux souffre d’insomnie et se met à chanter vers trois heures du matin, tous ses congénères, qui ne souhaitent pas être en reste, vont lui répondre et entamer un concert qui ne se terminera qu’aux aurores. 

L’heure à laquelle il me faut me lever.

L’autre soir, alors que nous sommes en plein été philippin, au milieu de la saison chaude, une vague de froid s’est abattue sur la ville. Le thermomètre que j’ai consulté indiquait 16º C, alors qu’il faisait plus de 35º C dans la journée et que le ciel était parfaitement dégagé. Les deux couvertures que j’ai utilisées cette nuit là n’étaient pas de trop.

J’ai reçu ce matin, avec l’arrivée d’un steamer de notre compagnie, des journaux des Amériques.


J’ai ainsi eu la possibilité de m’informer des dernières nouvelles de San Francisco et en gros titre j’ai lu : ‘’Il y a au moins deux cas de variole à San Francisco, tout le monde est alarmé, des milliers se font vacciner.’’

Etonnant pour moi qui vis à Manille, curieux vous ne trouvez pas ? 

Alors que tous les jours je vois jouer et courir dans la rue de petits enfants qui sont couverts des marques de la maladie. Personne ne fait attention à la variole dans la ville, il y a longtemps que l’on a cessé de la remarquer, elle fait presque partie du paysage.

Vous pouvez très bien vous trouver dans le tram avec une maman philippine qui tient dans ses bras un bébé entortillé dans de pauvres linges et dont la seule partie visible, le visage, est éclairé par ces marques que l’on ne peut confondre avec aucune autre.

Il parait même qu’il y a encore quelques mois il y avait près de quatre cents morts par semaine dans la ville, uniquement du fait de cette seule maladie.

De la façon dont les valides se mélangent facilement avec les porteurs de la maladie, je n’aurais pas été étonné si l’on m’avait annoncé le chiffre de quatre mille.

La variole, à ce que j’en ai entendu dire, se propage plus facilement durant la saison sèche et froide de nos hivers tropicaux. Le mal semblerait difficilement supporter les fortes chaleurs et comme nous sommes maintenant au cœur de l’été, l’on ne rencontre presque plus de gens affectés dans les rues.


Un effort particulier a été fait pour enrayer les épidémies et les bateaux à vapeur en provenance du Japon ramènent régulièrement des cargaisons entières de la lymphe destinée aux vaccinations.

La plupart des indigènes ne comprennent pas pourquoi ils devraient subir cette expérience d’une aiguille enfoncées dans les chairs et d’un liquide injecté dans le sang. Ils préfèrent de beaucoup avoir la variole que de se faire vacciner. Après tout, on ne l’attrape qu’une fois !

Mais peut-être prennent-ils ceci comme une épreuve, un passage imposé, une sorte de scarification obligatoire, allez savoir ce qu’ont pu leur raconter les Chamans et sorciers locaux ?

Dans ce cas il n’est pas étonnant que soixante quinze pour cent de la population aborde ces marques flatteuses de l’attention que leur a porté la maladie.

Maintenant, c’est un peu triste à raconter, mais il faut tout de même que je vous dise la vérité, que je vous parle de la seule et unique perte consécutive à cette maladie que nous ayons eu à déplorer dans notre petite communauté.

Il n’y a pas de cela très longtemps, cinq à six semaines peut-être, je me trouvais en compagnie d’un jeune anglais, qui depuis son arrivée sur les îles a toujours vécu avec la terreur d’attraper un jour cette maladie. Nous nous trouvions à bord d’un de nos petits voiliers, ceux qui font la navette entre manila et les villes côtières du Laguna de Bay, le grand lac d’eau douce qui se situe à l’est de la ville.



Lors de notre discussion qui se déroulait à la proue du navire, il m’expliquait comment il faisait tout pour éviter le contact avec les indigènes et comment il refusait obstinément de se rendre dans les zones infectées. Après avoir récupéré les marchandises qui lui étaient destinées, à proximité de la ville de Santa Rosa, une cinquantaine de tonneaux d’huile de coco destinés à l’exportation, nous prîmes sous un vent régulier et porteur le chemin du retour.

Une fois la marchandise chargées sur les carrioles qui nous attendaient au port et connaissant son aversion à se mélanger aux locaux, je lui offris une place dans ma calèche.

Ensemble, conduits par mon fidèle cocher, nous traversâmes la ville d’est en ouest, avant de nous arrêter pour quelques verres à mon Club situé le long de la Marikina River.

Je ne l’ai jamais revu, pauvre gars. Bien que je l’aie déposé devant la porte de son domicile, le lendemain matin il présentait les symptômes de la variole et il mourut dans la semaine.

Les familles des mariniers, qui vivent entassées comme des poules sous le pont, à la poupe de l’embarcation, sont très certainement responsables de la transmission de la maladie qui a emportée ce jeune Anglais. Pourtant, en règle général les membres de la colonie anglophone sont tellement habitués à cette maladie qu’ils côtoient tous les jours, qu’ils n’y prêtent guère attention et ne prennent aucune précaution particulière.


Par le passé, lorsque le choléra décimait la ville, lorsque les gens mourraient plus vite que l’on ne pouvait les enterrer, alors que les affaires étaient totalement arrêtées et que Manille n’était plus qu’un grand mouroir, il était impossible de trouver de l’eau potable, de l’eau qui ne soit pas contaminée.

Mais maintenant, avec ces conduites qui apportent l’eau fraîche provenant des montagnes, les indigènes ont abandonné la pratique qui consistait à boire l’eau mortelle des rivières et des ruisseaux qui sillonnent la ville. Grace à l’excellent système d’alimentation en eau qui approvisionne Manila, les grandes épidémies ont désormais disparu.

A côté de la variole, les fièvres sont certainement notre plus grand ennemi. Certaines variétés de paludisme sont si communes, qu’il arrive fréquemment qu’un membre du Club s’écroule dans un fauteuil en s’exclamant « J’ai encore choppé la fièvre, je vais devoir à nouveau m’aliter ».

Dès le 17ème siècle l’écorce de Quinquina, également appelée herbe des Jésuites, était connue par les Européens et utilisée pour lutter contre les fièvres malignes.

Mais ce n’est qu’à partir de 1821 que les chimistes français Joseph Pelletier et Joseph Caventou purent extraire les principes actifs de l’écorce.


Je rappelle que le Quinquina est un petit arbre originaire du Pérou et que la substance active se situe dans l’écorce. Seules les variétés rouges et jaunes sont utilisées.

Depuis que je me trouve dans ces contrées à risque, je bois avant chaque repas un verre de quinquina. Croyez-le ou non, je n’ai jamais attrapé de fièvres. Cela ressemble un peu à du vin cuit, mais très amer, néanmoins certainement moins difficile à avaler que nombre de ces potions que vous proposent les apothicaires locaux.

C’est une recette de vieux routier qui a prouvé son efficacité.

Les jeunes préfèrent utiliser des produits plus modernes, ils achètent également des thermomètres et sont toujours à contrôler la température de leurs corps, inquiets à la moindre petite montée du mercure dans le tube.

J’ai un ami qui est resté près de huit semaines dans une semi-inconscience, son cerveau en a peut-être souffert. Quand il est sorti pour la première fois après sa terrible maladie et qu’il a couvert son chef avec son chapeau, ce dernier lui est tombé sur les oreilles.

Je soupçonne fort que le chapeau, entreposé dans un endroit humide, se soit élargi de ce fait.
Je ne verse pas dans la thèse de certains qui voudraient que ce soit le cerveau qui ait diminué de volume.

La fièvre typhoïde semble également très commune, un certain nombre de membres de la colonie prennent régulièrement des bains dans une eau ou se trouve de la glace et prennent toutes sortes de potions plus ou moins magiques, tout en souhaitant n’avoir jamais connues les Philippines.

D’autres, parmi les plus anciens, ne jurent que par le whisky. 


Ils crient bien haut et fort à qui veut bien les entendre, mais il faudrait être sourd pour ne pas les entendre, que la seule façon de ne pas attraper quelque chose est de boire du whisky, beaucoup de whisky. Certains d’entre eux ont du tellement en boire qu’ils ont parfois du mal à exprimer intelligiblement leurs convictions, de plus ils doivent friser la cirrhose du foie et ne pas être très éloignés de la crise d’apoplexie.

J’ai lu dernièrement, dans un récit de voyage, que s’il se mettait à faire trop chaud à Manille, il était toujours possible d’aller se réfugier à Hong Kong.

Mais Hong Kong c’est encore plus chaud, c’est collant, rien de plus désagréable que Hong Kong, plus spécialement durant les mois de mai à octobre. L’on y est totalement entouré par les montagnes, l’air n’y circule pas, l’on ne reçoit pas la mousson du sud-ouest, l’on y étouffe.

Nos mois les plus chauds vont de mars à mai, parfois une partie de juin, juillet août, septembre et parfois octobre sont rafraichis par les pluies de la mousson.

Maintenant, vous devez sûrement vous poser la question de savoir pourquoi, alors que je vous écrivais régulièrement de Hong Kong, je vous écris aujourd’hui de Manila ; avec un seul l, nombreux sont encore ceux qui écrivent cette capitale fort mal connue ‘’Manilla’’.

Ceci fera l’objet de ma prochaine missive, je vous parlerai plus en détails de la traversée épique, ainsi que de mon arrivée dans cette ville que j’ai découvert pour la première fois au mois de novembre dernier.


Manila le 20 avril 1895.


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